• Dans les pas du petit TimonierDifficile de laisser une trace dans la grande Histoire de Chine, notamment lorsque l'on ne possède pas la posture d'un grand homme et que l'on doit succéder à une figure populaire quasiment déifiée : Mao Zedong. Tel devait être l'état d'esprit de Deng Xiaoping en 1978, lorsqu'il accéda officiellement à la fonction suprême du Parti Communiste.

    Le petit timonier, loin d'être aussi charismatique que son prédécesseur, choisira donc la voie du pragmatisme à celle des grands discours et mouvements populaires. L'Histoire va dans sons sens, car après la fin de la catastrophique Révolution Culturelle fomentée par Mao Zedong pour reprendre le contrôle de la Chine, le gouvernement a plus que jamais besoin d'un homme d'action pour remédier à l'état de sous-développement dans lequel se trouve l'empire céleste. La politique d'ouverture économique de Deng Xiaoping tombe donc à pic, à un moment où le modèle politique et social prôné par le Parti Communiste chinois depuis des décennies, a montré l'étendue de ses limites.

    L'ouvrage Dans les pas du petit timonier d'Adrien Gombeaud, publié aux éditions du Seuil en 2013, nous plonge ainsi dans cette histoire discrète de la Chine, celle d'un petit homme pragmatique et persévérant, qui a su, malgré les difficultés, faire prendre à son pays un virage historique qui l'a sauvé de la descente aux enfers dans laquelle l'avait plongé les politiques de l'ère maoïste.

    De Guang'An au Parti

    L'auteur choisit de nous faire découvrir Deng Xiaoping à travers les lieux qui ont marqué sa vie, mais aussi et surtout, à travers ces zones de développement économique, qui ont poussé aux quatre coins de la Chine, et représentent son plus grand héritage.

    La découverte du personnage commence naturellement par son lieu de naissance, Guang'An. Deng Xiaoping, né Deng Xixian, voit le jour en 1904 dans cette petite ville paisible du Sichuan, qui s'est depuis métamorphosée sous l'impulsion des réformes de l'enfant du pays. Sa famille fait partie des notables de la ville, ce qui lui permettra d'avoir une bonne éducation. A 19 ans, il poursuit brièvement ses études supérieures à Chongqing avant de profiter d'un programme "Travail-études" de son université pour s'embarquer pour la France l'année suivante. Cette aventure débute à Shanghai, ville-monde, où il découvre le monde occidental avant l'heure : Il est déjà loin du Sichuan où il ne retournera que 30 ans plus tard.

    Dans les pas du petit TimonierA l'époque où Deng part pour Marseille, il fait le chemin inverse de nombreux chinois moins favorisés qui avaient fait le trajet quelques années plus tôt pour participer à l'effort de guerre durant la première guerre mondiale (200.000 chinois auraient ainsi été envoyés en France pour la seule année 1917). En France, il travaillera dans les usines du Creusot, de Montargis et de Chalette où il développera aux contacts de certains de ses compatriotes, un intérêt grandissant pour la philosophie marxiste. Il part ensuite pour Paris où il prendra la tête de mouvements révolutionnaires chinois dans la capitale, lui valant d'être mis sous surveillance des autorités françaises. cela ne l'empêche pas de participer à des débats de société dans des lieux mythiques comme la Bellevilloise où il exposera sa vision du socialisme [Lieu plus connu désormais pour son attroupement massif de hipsters parisiens].

    Deng retourne ensuite en Chine en 1924 et assiste à la montée en puissance du tout nouveau Parti Communiste Chinois (PCC) qui s'est créé entretemps. Il affirme son engagement révolutionnaire et participe à des campagnes au côté de Mao Zedong, tout en restant en retrait des projecteurs. Après 1949, Deng se distingue par son dévouement au PCC. Son fait d'arme majeur reste son action dans la purge "anti-droitière" qu'il mène au Sichuan en 1951 sur ordre de Pékin [Il est bon de noter qu'il aura pris soin de mettre à l’abri sa famille sachant pertinemment le carnage qui se préparait contre les "bourgeois" dans cette période troublé]. La carrière politique de Deng est ainsi fortement tournée vers le marxisme à ses débuts et ne laisse que peu percevoir la facette de réformateur de l'homme de l'ouverture économique de la Chine.

    Pourtant, Deng est bel et bien déjà tourné vers un modèle mixte. En effet, après l'échec cuisant du Grand Bond en avant mené par Mao à la fin des années 1950, Deng prend partie pour Liu Shaoqi qui remplace Mao Zedong aux plus hautes fonctions de l'Etat, afin de redresser le pays en proie à l'une des pires famines de son histoire. C'est bien ce choix stratégique douteux qui précipitera la chute du petit timonier lors a tourmente de la Révolution Culturelle où il essuiera les pires critiques et humiliations de sa vie. A ce moment, Deng est au plus bas, et sa survie tient presque du miracle en ces années de folie. Il est à l'époque caricaturé dans les journaux officiels, représenté comme un nabot, ou encore ridiculisé par des pamphlets vindicatifs contre sa personne, en témoigne cet extrait de sa fiche signalétique rédigée dans les années 60 :

    "...Extraction familiale : Tyrannique propriétaire terrien

    Rang dans le Parti : Faux membre du Parti Communiste

    Caractéristique : Opportuniste

    ..."

     Deng Xiaoping arrive malgré tout à survivre à ce marasme mais restera isolé politiquement jusqu'à la mort de Mao et le retour de la Chine à la raison. Il faut attendre 1978 pour que le vent tourne pour Deng et qu'il triomphe face aux conservateurs dirigés par Hua Guofeng. A partir de ce moment, le petit timonier prend du galon et commence à présenter ses plans pour l'avenir de la Chine, et tout démarre par cette phrase mythique : "Enrichissez-vous!". Ainsi débutent les zones économiques spéciales, les restructurations des entreprises d'Etat... afin d'offrir aux chinois les "4 boîtes" (Réfrigérateur, lave-linge, télévision, radio) et les "3 roues" (Montre, vélo, machine à coudre). La machine est lancée et dopée par des initiatives publiques d'envergure.

    Dans les pas du petit TimonierSur la scène internationale, Deng s'illustre lors des négociations sur la restitution de Hong Kong à la Chine avec M. Thatcher en 1982. La Chine, jusqu'alors sous estimée par les pays d'occident, commence à faire entendre sa voix.

    Les années 80 sourient à Deng et à la Chine, et c'est sur cette lancée qu'il entreprend en 1992 son voyage dans le Sud en train, comme l'avait fait son prédécesseur Mao. Cet évènement est longuement relaté dans l'ouvrage d'A. Gombeaud car sa symbolique est très forte : Deng Xiaoping souhaite montrer à la Chine qu'il est un dirigeant d'envergure comme Mao Zedong en 1971 : le petit timonier assume enfin son rôle public. Et de cette popularité, Deng en a bien besoin pour redorer son image fortement ternie depuis les évènements de la place Tiananmen en 1989. Ce périple en direction du Sud, loin de n'être qu'une référence au grand timonier, est surtout un voyage en terrain connu, sur les terres de ses premières réformes, là où il est le plus respecté : le Guangdong. 

    Dans les pas du petit TimonierShenzhen, représente ainsi l'apogée de ce voyage. Cette cité que Deng a créé ex nihilo sur un village de pêcheur est sans conteste son triomphe, une Californie en terre communiste aux portes de Hong Kong. Ce projet débute le 26 Août 1980 et marque la concrétisation des réformes de Deng, la seconde vague de réformes redonnera également son statut à Shanghai, punie jusqu'alors par le Parti pour son indécence passée.

    Ce voyage, point culminant du règne de Deng, marque aussi le lent déclin du vieil homme déjà âgé de 88 ans. Ainsi, ce voyage ne donnera pas lieu à de grands discours maoïstes, puisque le petit timonier, trop affaibli et peu enclin aux bains de foule, distillera plutôt ses citations célèbres dans des réunions en comité restreint.

    Cet affaiblissement progressif de Deng l'emportera finalement le 19 Février 1997, entouré de ses proches, quelques mois seulement avant la rétrocession de Hong Kong à la Chine.

     

    Un homme de l'ombre

    Si le nom de Deng Xiaoping résonne à travers le monde comme l'architecte de la Chine modernisée et puissante, il n'en reste pas moins un personnage méconnu et même peu reconnu dans son pays.

    Dans les pas du petit TimonierEn effet, A. Gombeaud, dans son ouvrage, appuie sur cette dichotomie entre les faits d'arme de l'homme et la reconnaissance qui lui est manifestée par la population chinoise. Le culte de la personnalité qui entourait Mao Zedong ne s'est pas transmis à Deng Xiaoping car les deux hommes étaient radicalement différents. La Maomania perdure, car celui-ci a utilisé son charisme et les moyens de communication de son époque d'une bien meilleure façon que Deng ne le fit. Deng était en effet un être pragmatique mais pas une figure d'autorité comme le fut Mao. 

    Cependant, ces éléments ne peuvent seuls, expliquer la dominance de l'héritage de Mao dans la conscience collective chinoise. En effet, l'accession au pouvoir de Mao représente avant tout une libération soudaine d'une classe jusqu'alors sous considérée : les paysans. Mao n'aura ainsi de cesse de maintenir l'esprit de la révolution et de brosser la classe dite "prolétarienne" dans le sens du poil. Ainsi, au-delà de ses talents d'orateurs certains, Mao a marqué davantage les chinois car il a établi un réel changement de paradigme dans la société.

    Deng, lui, arrive au contraire après Mao pour réparer les erreurs stratégiques de ce dernier et ainsi organiser le retour à la réalité de la Chine, et par là, le retour à l'ancien modèle de domination de l'argent sur l'idéologie. Pour les chinois, l'arrivée au pouvoir de Deng a donc coïncidé avec la fin du "bol de fer", c'est-à-dire, la fin d'une société où le Parti leur garantissait une situation stable (Emploi, logement, couverture santé...) tout au long de leur vie.

    Dans ce contexte, le  renforcement du culte de Mao récemment, exprime la nostalgie d'une partie de la population face aux injustices de la société chinoise actuelle où les différences de richesses ont atteint un niveau critique.   

    Dans les pas du petit Timonier

    Deng Xiaoping restera malgré tout dans l'Histoire de la Chine comme le dernier dragon de l'aventure maoïste. Il laisse sa place à la nouvelle génération de princes rouges, qui comme lui, utiliseront l'héritage de Mao pour fédérer le peuple chinois et les préceptes économiques occidentaux pour dynamiser la croissance du pays.

    Deng a su, par sa persévérance, guider la Chine vers une reconversion nécessaire. L'homme peu charismatique, aura su, dans cet objectif, utiliser son meilleur atout : son pragmatisme.

    La phrase d'introduction de l'ouvrage Dans les pas du petit timonier, à elle seule, résume ce personnage si mystérieux au destin incroyable, qui semblerait avoir atteint les sommets presque malgré lui :

    "- Qu'as tu fait pendant la Longue Marche? Ai-je demandé un jour à mon père.

    - J'ai suivi, répondit Deng"

    Deng Maomao : Deng Xiaoping mon père.


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  • China has shown recently an unsual aspect of its growing global presence: Humanitarian intervention.

    The recent earthquake in Nepal on April 25th revealed the new involvment of the People's Liberation Army (PLA) on the international stage.

    China, after a quiet economic development during decades, seems finally ready to endorse its role as a central geopolitical power in the Asia-Pacific region to the great displeasure of the United States.

     

     The PLA to boost China's international standing

    The growing international role of the PLA

    The People's Liberation Army (PLA) is becoming a new tool for positive communication of China to the world.

    Beijing responded to the earthquake in Kathmandu with a remarkable speed, sending rescue teams six hours only after the catastrophe. This first team was quickly followed by the dispatch of more than a thousand PLA soldiers to Kathmandu and remote areas of Nepal, tons of relief materials sent with 8 transport planes... which represents the biggest humanitarian aid mission since 1949 and the founding of the "New China".

    Thus, China has made it clear to the world that the PLA is operational to intervene in any emergency situations around the world.

    The growing international role of the PLAEarlier this year, the PLA showed to the world another demonstration of its capacity to manage large-scale military aid interventions. The evacuation of people from Yemen, even though it did not have media coverage, was a significant operation led by the PLA. Indeed, in April 2015, the chinese dispatched PLA Navy frigates in Yemen to repatriate 225 nationals from 10 different countries. The operation was as surprising - Beijing is not famous for rescuing its overseas citizens - as efficient. Moreover, the US were shamefully absent from this operation as they refused to evacuate US citizens. The presence of Chinese Navy being quite important in the Gulf of Aden as a part of the antipiracy efforts in the region led from Djibouti, the PLA had an opportunity to remind other countries of the positive intentions of its deployment around the world. Last year, chinese army also had some striking humanitarian actions such as the aid to fight the Ebola epidemic in Sierra Leone and Liberia...

     

    Tus, the PLA seems to have multiplied aid missions recently in a campaign to boost its positive image and especially dispel distrust towards China's growing military capacities. It supposes to go through a humanisation of the PLA which embodies the image of "non-agressive" development that Beijing wants to project: the famous "Chinese soft power".

     

    The distrust towards the PLA

    These goodwill interventions are a good thing as it shows that China starts taking seriously its role as a prominent global leader, and the responsibilities it entails.

    However, The PLA is also facing a huge paradox as it is gradually seen as a major threat for the stability of the Asia-Pacific region.

    The most burning issues concern the numerous territorial claims of Beijing in the China Sea and the Yellow sea around China. This threatening stance was exacerbated in December 2013 when China announced the creation of its ADIZ [Air Defense Identification Zone: See previous article on this blog: ADIZ (in French)] which included some disputed islands with its neigbouring countries.

    The most famous conflict concerns the Diaoyu islands (Senkaku in Japanese) which represents one of the source of tensions between China and Japan. But China is also threatening other countries, especially Vietnam and the Philippines, disputing them some of their islands and fishing areas.

    The United States are even more worried by the PLA military programs on some archipelagos of the South China Sea where China is building great military infrastructures (naval bases, airstrips, logistics infrastructures...) at an unprecedented pace [See the interesting article from the Diplomat: South China Sea: China's Unprecedented Spratlys Building Program]

    The growing international role of the PLA

     

    We can consider that the extended activities of the PLA outside China are a logical evolution of Beijing's growing importance in the global geopolitical chessboard. The PLA has taken its part in the role of "global policeman" that the US have exercised almost alone for a long time. From this point of view the extension of the military bases of the PLA worldwide is not worrying. It is normal that Beijing challenges the US on the Asian continent as it has now replaced Japan as the leader over the region. However, the recent military building programs of the PLA in the South China Sea can raise questions about the peaceful intents of Beijing. The building programs on the Spratly islands for example, represent a major risk for the stability in the region as it gives China a military control over the most strategic maritime road in the world.


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  • La lutte contre la corruption passe à la vitesse supérieureLa lutte contre la corruption, cheval de bataille du mandat de Xi Jinping, commence à porter ses fruits et montrer des résultats tangibles. Des indicateurs comme l'évolution du marché des produits de luxes, du secteur immobilier et même, la nette baisse des revenus des casinos de Macau, semblent indiquer que les officiels chinois de tout le pays ont adopté un comportement beaucoup plus prudent, craignant les sanctions du Parti.

    Cette lutte contre les "Tigres et les mouches" (Les hauts dignitaires et les petits officiels locaux) a en effet ratissé large puisque près de 200 000 officiels ont été sanctionnés ces deux dernières années en Chine (Peines d'emprisonnement, suspensions, amendes, expulsion du Parti...). Un article du NY Times revenait d'ailleurs cette année sur des témoignages de chinois évoquant les impacts directs sur leur vie quotidienne de l'efficacité de cette lutte : moins de pots-de-vin à verser à des maires locaux pour ouvrir un business, moins de frais de scolarité pour les écoliers...

     

    Cependant, si les résultats positifs de cette politique sont incontestables, la plupart des enquêtes émanaient jusqu'alors plus du Parti que de la société civile. C'est pourquoi, sûr de la direction donné à sa lutte, le Parti a récemment décidé d'élargir son dispositif anti-corruption pour le faire passer à la vitesse supérieure grâce à la contribution active des chinois.

     

    L'ouverture de la chasse aux corrompus

    Différentes initiatives mises en place par la très sérieuse CCDI (Central Commission for Discipline and Inspection), l'organe de lutte anti-corruption du Parti, ont vu le jour ces dernières semaines, et doivent être perçues comme des annonces officielles d'une nouvelle ligne directrice du Parti : Laisser le peuple s'exprimer sur les abus de la corruption.

    Parmi ces initiatives figurent par exemple la création d'un site public pour la lutte anti-corruption. Cette plate-forme, soutenue par la CCDI et l'agence de presse officielle Xinhua, permettra aux chinois d'exposer leurs plaintes face à des abus de manière anonyme. 

    D'autre part, l'organe d'information central du Parti, la chaîne de télévision CCTV, s'apprête à diffuser une série de quatre documentaires sur les abus des "tigres" et les méfaits des "mouches" pour accompagner ce dispositif d'ouverture de la "chasse". Cette série agrémentée de témoignages de victimes, de documentaires sur les clubs privés des cadres du Parti, ou encore d'investigations au sein de ce milieu de débauche, a pour objectif premier de lancer un message fort aux chinois : "Réagissez sur ce mal qui ronge la Chine".

     

    La campagne marketing du Parti est donc plutôt bien rodée. La grogne populaire étant à son paroxysme, il est temps de laisser les chinois s'exprimer sur le fléau qu'est la corruption, tout en encadrant ce mécontentement dans un appareil public organisé. Xi Jinping met donc peu à peu en place une stratégie astucieuse de "fausse" ouverture maîtrisée, dont le dessein ne peut réellement faire l'objet de critiques.

    Le Parti central veut montrer une fois de plus sa détermination et sa professionnalisation au peuple chinois par un message publicitaire simple : "Vous n'êtes pas seuls face aux injustices quotidiennes qui vous entourent". Xi Jinping s'assure par ce geste, un soutien populaire, tout en faisant le ménage dans le Parti, et si cette incitation à la dénonciation peut avoir un goût amère de Révolution Culturelle, elle n'en reste pas moins légitime sur le fond du problème, et vitale pour la survie du système en place.


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  • Zhou YongKang : the Dead EndJe vous l'annonçais dans un article il y a trois mois (Liu Han : Le déclin du parrain du Sichuan) et c'est donc officiel désormais : Zhou Yongkang, l'ancien chef des services de sécurité intérieure de Chine, fait depuis peu l'objet d'une enquête pour corruption.

    La nouvelle a été rendue publique le 29 Juillet par l'agence Chine Nouvelle. Cette affaire fait ainsi entrer la lutte contre la corruption de Xi Jinping dans une autre dimension puisque Zhou Yongkang est l'officiel le plus gradé à tomber depuis 1980 et le fameux procès de la "bande des quatre" où la veuve de Mao fut reconnue coupable de trahison. Zhou doit donc être derrière les barreaux depuis déjà des semaines, voire des mois, et a déjà dû "confesser" ses crimes à l'heure qu'il est.

    Un homme de pouvoir

    Zhou YongKang : the Dead EndZhou, à 71 ans, était depuis 2012 retraité du Parti après une brillante carrière dans les fonctions les plus centrales du pays. Il a en effet occupé jusqu'en 2012 la fonction de membre du comité permanent du bureau politique du Parti Communiste, ce qui faisait de lui l'une des 9 personnes les plus puissantes de Chine.

    M. Zhou occupait également en ce temps le poste de chef de la Sécurité Intérieure du pays, poste clé en Chine, puisque cette fonction faisait de lui le chef suprême de la police, des renseignements civils et de la justice.

    On peut ainsi supposer que cet homme dur, au pouvoir sans limites, représentait de toute évidence un risque pour Xi Jinping qui a préféré l'évincer avant qu'il ne devienne une menace.

    "Combattre les tigres et les mouches"

    Ce mot d'ordre lancé par le président Xi est clair, qui que vous soyez, personne n'échappera au raz-de-marée de la lutte anti-corruption.


    Zhou YongKang : the Dead EndL'arrestation de Zhou Yongkang représente sans doute la meilleure capture de tigres réalisée par le Parti, car s'il n'est pas le plus enrichi des corrompus tombés sous l'ère Xi, Zhou Yongkang reste malgré tout un sacré poisson avec un réseau tissé dans toutes les sphères de la société chinoise, rendant ainsi sa chute bien plus compliquée à orchestrer.

    Un article du New York Times revenait d'ailleurs il y a peu sur ce puissant réseau qui aurait permis à son fils, sa belle-fille et la mère de cette dernière d'accumuler pas moins de 160 Millions de Dollars dans le secteur énergétique notamment, où il avait ses entrées.

    Ses relations n'ont cependant pas toujours joué en sa faveur, et sa décision de soutenir Bo Xilai, le prince déchu de Chongqing condamné pour corruption en 2013 par Xi Jinping, a inévitablement précipité sa chute. Les relations de ses proches n'étaient pas non plus du meilleur goût puisque son fils, Zhou Bin, a été cité dernièrement dans le procès de Liu Han, le parrain mafieux du Sichuan.

     

    C'est donc la fin pour la dynastie Zhou! La médiatisation de cette affaire par les journaux chinois fait déjà office de jugement avant l'heure, car aucune affaire sensible n'est rendue publique à l'heure des délibérations, seul le résultat l'est.

    La vraie question, dans ce safari géant mené par Xi Jinping depuis son accession au pouvoir, est donc désormais : Qui sera le prochain grand ponte à mordre la poussière?


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  • Pékin évoque le projet d'une ligne à grande vitesse Chine-USALe China Daily, journal d'information du Parti, a publié ce Jeudi 08 Mai, un article évoquant un projet titanesque : relier la Chine et les Etats-Unis par train.

    Ce projet est sérieusement étudié par les autorités chinoises et s'inscrit dans dans les ambitions de Pékin d'élargissement de son réseau ferroviaire dans les décennies à venir.

    Cette ligne de chemin de fer à grande vitesse relierait ainsi les deux pays via le détroit de Béring, traversant la Sibérie, l'Alaska et le Canada. Les parties maritimes seraient également complétées par une série de tunnels de 200 km de long utilisant une nouvelle technologie déjà développée pour un autre gros projet à venir : la ligne Fujian - Taiwan. Ainsi, le trajet vers les Etats-Unis pourrait être fait en 2 jours à une vitesse moyenne de 350 km/h.

    Ce projet gigantesque à l'initiative de la Chine, devrait être entièrement financé et réalisé par Pékin.

    Projet à suivre de très près...

     

    Pour mieux comprendre les ambitions de la Chine sur les lignes à grande vitesse, voir aussi mon article "L'empire du rail" dans Economie.


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  • Liu Han : Le déclin du parrain du SichuanLiu Han, ce nom ne vous dit peut-être rien, mais ce milliardaire chinois a fait parler de lui ces dernières semaines en Chine.

    Cet homme d'affaires richissime, patron de Sichuan Hanlong Group, spécialisée dans les matières premières et l'énergie, notamment l'extraction minière, fait actuellement l'objet d'un procès retentissant dans le pays. Liu est en effet jugé pour meurtre, crime organisé, jeux illégaux ainsi que détention d'armes en grande quantité. Son procès, et celui de 35 autres personnes dont son frère, Liu Wei, fait la une des journaux depuis début Avril. L'histoire a en effet tout pour plaire : mafia, meurtres et corruption, tous les ingrédients d'un bon polar sont là.

    Liu Han : Parcours d'un parrain du Sichuan

    Liu Han : Le déclin du parrain du SichuanLiu Han est né en 1965, au commencement de la Révolution Culturelle, à Guanghan dans le Sichuan, au sud-ouest de la Chine. Ses parents sont professeurs, mais l'ouverture économique des années 1980, et l’appât du gain naissant en Chine, éloignent bien vite Liu d'un avenir intellectuel. Il commence ainsi à faire des affaires dans la construction et le commerce du bois. Dans les années 1990, avec son frère, Liu Wei, ils se lancent dans des affaires plus illicites et ouvrent une salle de jeux à Guanghan. Les affaires sont vite très florissantes pour les deux frères, il est temps de se diversifier vers des activités plus propres.

    Le groupe Sichuan Hanlong est ainsi créé en 1997 avec des activités principalement basées sur l'énergie, l'extraction minière et l'immobilier. L'entreprise se développe très vite et son dirigeant, Liu Han, se fait un nom du Sichuan jusqu'à Pékin, où il s'attire la sympathie d'alliés de choix qui le protégeront des enquêtes. L'homme est donc un businessman né, et un fin politicien.

    Liu Han est un personnage multi-facettes, généreux philanthrope le jour, qui n'hésite pas à financer des constructions d'écoles après le terrible tremblement de terre du Sichuan en 2008, et joueur invétéré la nuit, pouvant dépenser des millions de dollars à Macau en une seule soirée.

    Un journaliste du Wall Street Journal le décrira comme l'un des hommes les plus hauts en couleur qu'il ait interviewé, arrivant au déjeuner en manteau de vison et Ferrari bleue...

    La chute de la tête de dragon

    Le problème des hommes d'affaires puissants en Chine est de savoir faire profil bas, et le style de gangster de Liu Han est perçu peu à peu comme un affront par Pékin. Liu Han est ainsi inculpé une première fois en 2013 puis relâché par Pékin qui garde un oeil sur lui...

    Le parrain et son entourage agissent en effet en toute impunité et n'hésitent pas à commanditer des exécutions de rivaux lorsque la concurrence en affaires devient plus soutenue. Mais c'est le meurtre de trois personnes à une terrasse de café de Guanghan en 2009, qui met le feu aux poudres. La police

    Liu Han : Le déclin du parrain du Sichuansoupçonne immédiatement Liu Wei, frère de Liu Han, d'être à l'origine de cette fusillade. 

    Cette affaire, et les nombreuses découvertes qui suivront, déboucheront ainsi sur l'inculpation de Liu Han, son frère et 34 autres personnes puis le procès actuellement en cours.  

    L'ombre de la lutte anti-corruption dans le procès Liu Han

    Pour réussir dans les affaires, il faut des appuis, et Liu Han n'a pas oublié de soigner son image politique au niveau local comme national. Notre homme a profité de "parapluies protecteurs" (保护伞), c'est-à-dire d'alliés politiques, dans toutes les sphères de la vie publique.

    Le procès de la famille Liu pourrait donc virer vers la chasse aux sorcières de la lutte contre la corruption menée par le président Xi Jinping.

    Les yeux se tournent déjà vers Zhou Yongkang, ex-directeur de la sécurité intérieure, et surtout ancien membre du comité permanent du Parti Communiste. 

    Liu Han : Le déclin du parrain du SichuanZhou Yongkang, lorsqu'il était secrétaire du Parti du Sichuan, aurait ainsi eu des liens privilégiés avec Liu Han et pourrait en avoir retiré des profits non négligeables. Et c'est bien là que ce procès devient très sensible, car si Zhou Yongkang fait déjà l'objet d'une enquête pour corruption, l'associer à des activités mafieuses est d'une autre envergure. L'étau semble donc se resserrer autour de la famille Zhou puisque le journal libéral chinois Caixin a établi un lien direct entre Liu Han et Zhou Bin, fils de Zhou Yongkang, pour des participations dans des projets immobiliers mystérieux.

     

    L'issue du procès qui s'est ouvert début Avril sera sans surprise pour Liu Han et son "gang". Cependant, nous ne sommes pas au bout de nos surprises dans cette enquête, et la mise en examen de Zhou Yongkang pourrait faire l'effet d'une bombe comme l'a été la chute de Bo Xilai en 2012, lui aussi figure centrale de la province Sichuan...


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  • L'émission Arte Reportage a diffusé ce Samedi 22 Mars, un reportage sur l'énigmatique Xi Jinping, président de la République Populaire de Chine. Loin de lever le voile sur sa personnalité, ce qui serait impossible tant les secrets d'état sont protégés en Chine, le documentaire s'attache plutôt à montrer les deux facettes de cet "ultra" président qui réussit le doublé parfait d'asseoir son pouvoir absolu sur le Parti tout en conservant une image sympathique auprès de la population chinoise par des actions concrètes pour le peuple.

    Ce reportage est visualisable sur Arte Replay pendant encore quelques jours (Voir le lien ci-dessous, juste après le documentaire sur l'Ukraine) :

    Docteur Xi et Mister Jinping


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  • Les fortunes cachées des princes rougesEn pleine lutte anti-corruption du président Xi Jinping, voilà une série d'annonces qui font tâche dans le monde politique chinois. L'internet chinois a connu une vague de censure sans précédent ces derniers jours suite à la diffusion par des journaux étrangers de Wikileaks rassemblés par l'ICIJ (Consortium International des Journalistes d'Investigation) exposant les fortunes colossales détenues par les "princes rouges" chinois dans divers paradis fiscaux, dont les îles Vierges Britanniques. 

    Mais qui sont ces princes rouges? Des parvenus ayant profités des relations politiques de leur illustre famille pour engranger des fortunes inestimables. Ces personnalités de l'ombre liées aux plus hauts dignitaires chinois, ont parfois attisé la colère du peuple chinois par leur étalage indécent de richesse (Voitures luxueuses, châteaux, soirées à excès...). Mais à l'heure du "grand nettoyage" contre la corruption, comment les hommes politiques les mieux placés du pays peuvent-ils rester crédibles tout en protégeant leurs proches eux-mêmes corrompus?

    Des révélations dérangeantes

    L'annonce sonne comme un pavé dans la marre. Les exemples révélés par Le Monde entre autres, montrent l'ampleur du sentiment d'impunité qu'éprouvent ces princes rouges. 

    Les fortunes cachées des princes rougesDes dizaines de milliers de riches chinois issus d'une lignée "rouge" élaborent en effet des stratégies complexes pour faire sortir leur argent de Chine via Hong Kong et le placer dans des paradis fiscaux, les îles Vierges Britanniques figurant en tête.

    Parmi les personalités, citons Deng Jiagui (Beau-frère de Xi Jinping) qui détient des participations dans plusieurs sociétés, toutes basées aux îles Vierges.

    Zhang Shugang, cadre dirigeant des chemins de fer chinois, a plaidé coupable pour avoir placé plus de 1,8 Milliards de Dollars sur des comptes Off-Shores.


    Mais l'exemple le plus parlant est celui de Wen Jiabao (Ancien Premier-Ministre sous l'ère Hu Jintao) dont la famille serait à la tête d'une fortune de plusieurs milliards de Dollars gagnés dans différents secteurs dont l'énergie ou encore les diamants. "Oncle Wen", comme les médias se plaisaient à le surnommer du fait de sa proximité avec le peuple, a même été obligé d'expliquer la provenance de sa fortune rendue publique par le New York Times.

    Les fortunes cachées des princes rouges

    Mais ce sont les affaires  ayant éclaboussés ses enfants, et notamment sa fille Wen Ruchun, qui ont mis le feu au poudre. Cette dernière, à la tête de la société de conseil Fullmark, s'est en effet vue verser une prestation de 1,8 Millions de Dollars par la banque JP Morgan Chase : montant totalement disproportionné au vue de son travail! La banque américaine est d'ailleurs en procès avec le gouvernement américain pour avoir embauché un nombre important de princes rouges payés une fortune au sein de ses bureaux chinois, afin d'élargir son réseau. Le plus étonnant dans cette histoire étant la société de Wen Ruchun, Fullmark, une société fantôme enregistrée aux îles Vierges par son mari unique actionnaire...

    L'organisation de "l'optimisation fiscale" des princes rouges

    Les documents de l'ICIJ nous révèlent également que cette évasion fiscale des princes rouges est un business bien organisé depuis des années. Des acteurs peu scrupuleux de sociétés d'audit et de grandes banques internationales et suisses notamment, ont des services spécialisés pour organiser les transferts de fonds.

    Les placements s'effectuent la plupart du temps via Hong Kong avant de se destiner vers les paradis fiscaux de la planète. De là, les riches chinois créent des sociétés afin d'investir dans le monde entier, y compris... en Chine continentale : ce sont les "opérations circulaires".

    La Banque Centrale de Chine estime ainsi que depuis le milieu des années 1980, les responsables publiques chinois ont fait sortir plus de 120 Milliards de Dollars vers ces paradis fiscaux.

     

    La Chine a montré cette dernière année, qu'elle était déterminée à lutter contre la corruption, ce que fait réellement Xi Jinping selon moi. Cependant, le mal qui ronge la société chinoise est si fortement ancré dans les rouages de la société qu'il paraît difficile d'aller jusqu'au bout de cette lutte, à moins de devoir arrêter la quasi-totalité des dirigeants du pays. Le gouvernement commence malgré tout à lutter "timidement" contre cet exode fiscal. En effet, depuis le 1er Janvier 2014, les chinois sont obligés de déclarer leurs actifs à l'étranger... une mesure plutôt molle pour contrer la grogne populaire, car au final, d'une manière ou d'une autre, une part non négligeable de ces capitaux sont réinvestis en Chine, alors à quoi bon lutter? 

     

    Les fortunes cachées des princes rouges

     


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  • Après des années de tensions latentes entre la chine et le Japon à propos de la souveraineté des îles Diaoyu (Senkaku en Japonais), Pékin vient de franchir une nouvelle étape dans sa guerre des nerfs contre Tokyo.

    En effet, la déclaration unilatérale d'une ADIZ (Zone d'Identification de Défense Aérienne) par la Chine incluant ces îlots disputés, fait grincer des dents au Japon comme aux Etats-Unis.

    Mais qu'implique la mise en place d'une ADIZ?

    L'Air Defense Identification Zone est un droit de chaque pays de définir un contrôle sur un espace aérien donné qui délimite plus ou moins sa souveraineté, même s'il n'est pas à confondre avec les revendications territoriales. Cela implique, qu'en cas de doute pour la sécurité nationale, tout vol peut être intercepté et détourné par les autorités du pays en question. 

    ADIZ : La chine montre les poingsLa chine a ainsi indiqué que tous les avions militaires et commerciaux traversant sa zone, quelque soient leurs destinations, devaient se déclarer auprès des autorités chinoises : Exigence évidemment balayée par Tokyo qui a donné pour consigne aux compagnies japonaises de ne pas coopérer.

    Le spécialiste de la sécurité internationale, Rory Medcalf, interviewé par le NY Times, nous explique clairement que, plus qu'une menace, cette zone de défense aérienne, a en fait pour but de mettre le Japon dans la posture du fautif. En effet, au sein de l'ADIZ, tout écart japonais serait une violation de la zone de sécurité chinoise, et un prétexte parfait à une riposte en faisant porter la responsabilité par Tokyo.

    Il ajoute que cette zone fait office de test pour les mers de l'Est de la Chine. Ainsi, nous pourrions voir le même type de projet faire surface en mer de Chine du Sud, où Pékin a également des revendications territoriales fortes.

    Les Etats-Unis dans l'impasse

    Ce durcissement de la position chinoise est également un avertissement certain pour les Etats-Unis. Joe BIDEN, en visite en Asie dernièrement, s'est d'ailleurs fortement inquiété de cette escalade nationaliste.

    ADIZ : La chine montre les poingsMais, comment les Etats-Unis peuvent-ils influer sur cette situation? En effet, Washington doit prendre des positions fortes pour affirmer son soutien politique à un Japon relativement faible militairement, sans froisser pour autant son "banquier" : la Chine. L'armée américaine, suite à l'annonce de la création de l'ADIZ, a certes rapidement dépêché un B52 au-dessus de la zone aérienne des îles Diaoyu (Senkaku) pour soutenir le Japon dans sa décision de ne pas céder aux menaces chinoises. Cependant, ils se sont ravisés suite à la réaction chinoise de faire décoller des avions de combat prêts à intervenir dans la zone. De plus, là où Tokyo a encouragé les compagnies aériennes nippones à ne pas se plier aux contrôles chinois dans l'ADIZ, les Etats-Unis, ont à l'inverse indiqué qu'ils respecteraient ce protocole.

    La chine pousse donc l'administration Obama à se prononcer clairement sur ses positions en les plaçant face aux limites de leur géopolitique en Asie.

    Un conflit historique

    Si les tensions actuelles sur la souveraineté des îles Diaoyu (Senkaku) font couler de l'encre dans les journaux chinois, ce différend n'est en fait qu'un prétexte pour deux gouvernements nationalistes, d'affirmer leur puissance dans la région.

    Les nationalistes chinois et japonais ne font en effet qu'attiser les ressentiments profonds de deux peuples au passé bien lourd. Il faut en effet replonger dans l'Histoire mouvementée de la Chine depuis le XIXème Siècle, pour comprendre comment de telles situations se sont autant envenimées.

    ADIZ : La chine montre les poingsLe XIXème Siècle a été une période de décadence pour l'empire Chinois, déstabilisé par les invasions européennes et les deux guerres de l'opium qui s'en sont suivies. La chine de la dynastie des Qing est faible à tous les niveaux : l'armée, l'administration et l'économie sont vieillissantes. Le pays n'a pas saisi l'opportunité de développer son économie de manière industrielle comme l'Europe, les Etats-Unis ou le Japon à la même époque : ce retard peut en quelque sorte expliquer tous les déboires connus par le pays tout au long du XXème Siècle.

    Le Japon à l'inverse, pour ne pas sombrer face aux puissances occidentales qui frappaient à sa porte, a choisi la voie du développement industriel pour rattraper son retard et prendre l'ascendant sur ses voisins asiatiques, notamment la Chine. Ses réformes économiques profondes débutent avec l'ère Meiji en 1868.

    Ce développement prodigieux nourrit alors des visions impérialistes de la part du pays du Soleil Levant. La première agression significative débute ainsi en 1895 avec l'invasion de la Mandchourie (Région du Nord de la Chine d'où sont originaires les Qing) par le Japon. S'ensuivront l'invasion de la Chine dans les années 1930, avec le terrible "massacre de Nankin". L'armée nationaliste japonaise ayant fait preuve d'une brutalité particulièrement cruelle jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, la plupart des peuples asiatiques, la chine en tête, ont développé une haine envers le Japon qui perdure encore d'une certaine manière.

    ADIZ : La chine montre les poingsLa montée en puissance économique de la chine depuis les années 1990, a fait ressortir le nationalisme latent des chinois. La nouvelle position internationale de Pékin a redonné confiance aux élites politiques et à la population, ce qui explique le retour des revendications territoriales en mer de Chine, sur les îles Diaoyu (Senkaku) et même sur Taïwan.

    Le Japon à l'inverse, apparaît comme affaiblit par la crise économique, une influence déclinante en Asie et un sentiment de pessimisme ambiant sur l'archipel. Le Premier Ministre japonais, Shinzo ABE, ravive ainsi la fierté nationaliste caractéristique des pays en déclin, afin de contrer le nationalisme triomphant de Pékin. Les îles Diaoyu dans ce contexte, et plus globalement, ses prises de position face à Pékin font partie de cette stratégie.

     

    La mise en place de l'ADIZ, loin d'être anodine, montre à l'inverse une escalade des tensions entre la Chine et le Japon. Si les risques pour la stabilité de la région sont faibles, en revanche, le message de Pékin est clair : "Personne ne ralentira nos ambitions sur le continent asiatique, pas même les Etats-Unis". Ces tensions, en dehors de leur impact international, permettent également au Parti Communiste de fédérer sa population vers la haine d'un ennemi commun, pour mieux asseoir son pouvoir en interne. Cette guerre des nerfs n'est donc pas prêt de s'arrêter puisque aucune des deux puissances n'a intérêt à montrer un signe de faiblesse en interne comme sur la scène internationale. 


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  • 3ème Plénum du Parti : quels sont les réelles réformes à venir?Le troisième Plénum du Parti Communiste, qui s'est déroulé du 9 au 12 Novembre dernier, a montré au monde la volonté de Xi Jinping de réellement réformer la Chine. Le président actuel de Chine affiche ainsi sa volonté d'en finir avec la demi-mesure prudente qui caractérise le PCC ces dernières années. Un coup Marketing parfait et bienvenue pour un gouvernement chinois en perte d'autorité.  

    Je vous propose donc de faire un tour d'horizon des réformes qui pourraient modifier la vie des chinois. 

    Réformes sociales d'envergure 

    L'annonce de la fermeture définitive des camps de rééducation par le travail (Enfin, nous sommes en 2013 quand même!!) est une annonce forte du gouvernement de rétablir une certaine justice et de limiter les abus de pouvoir (autant que faire se peut...). N'importe qui pouvait en effet être envoyé dans ces camps sans motif avéré! 

    3ème Plénum du Parti : quels sont les réelles réformes à venir?Mais si cette révolution semble déjà importante, le message le plus fort reste l'assouplissement de la politique de l'enfant unique au pays des petits empereurs. Cette politique mise en place en 1979, avait déjà été assouplie par des dérogations pour les minorités ethniques, les paysans ayant eu une fille, ou les couples eux-mêmes enfants uniques. La grosse différence à l'avenir sera la fin des contrôles, avortements forcés, amendes et autres injustices liées à la naissance d'un second enfant : Les pertes de revenus pour l'Etat et les collectivités locales sont certaines, mais un système de contrôle si visiblement "communiste" ne pouvait perdurer. On peut également penser qu'étant donné la pression du coût de la vie pour les classes moyennes du pays, l'arrêt futur de cette politique de contrôle ne devrait pas avoir de conséquences majeures. Beaucoup de couples enfants uniques considèrent qu'avoir un second enfant est un coût qu'ils ne peuvent pas se permettre. 

    Une autre mesure phare consiste à apaiser la pression qui pèse sur les travailleurs migrants chinois. Ces derniers, déracinés, sont souvent démunis dans leurs villes d'accueil, sans permis de résidence (Hukou), couverture maladie... Le document dévoilé promet ainsi une meilleure protection sociale à ces travailleurs qui ont fait de la Chine le pays flamboyant qu'il est devenu. Sans entrer dans le détail, ce guide des réformes s'est penché sur la question de la complexité des permis de résidence pour les ruraux qui souhaitent s'installer en ville. L'assouplissement pourrait se faire notamment pour les villes de taille moyenne où la population migrante est forte. 

    Réformes économiques 

    La phrase a été lâchée : désormais place au privé! L'effet d'annonce est fort mais qu'en est-il réellement? 

    En effet, l'économie chinoise s'appuie largement sur des gigantesques sociétés d'Etat au mode de fonctionnement capitaliste, supplées par des PME dynamiques. Cependant, ces groupes au fort potentiel d'investissement restent des structures rigides et corrompues : le pays doit donc axer son développement futur sur le secteur privé plus innovant car concurrentiel.3ème Plénum du Parti : quels sont les réelles réformes à venir?

    A la question posée ci-dessus, force est de constater que je ne peux rien ajouter de concret à ce discours hautement démagogique. Les enjeux se joueront certainement en termes de fiscalité pour les PME, mais le message reste encore flou. Il est dit également que les capitaux privés nationaux pourraient avoir plus de facilité à pénétrer les institutions financières du pays : détails encore une fois peu développés suite à ce plénum.

     

    Les nombreuses réformes condensées dans un document à la taille de l’ambition de la Chine, pourraient modifier le visage du pays d’ici 2020. Xi Jinping et Li Keqiang jouent leur crédibilité sur ce plénum dont la population chinoise, souvent abusée, attend beaucoup.  


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  • Pollution à Pékin : La note salée du grand nettoyageLe smog à Pékin est un sujet délicat pour le Parti. L'image détériorée de la ville à travers le monde, a ainsi poussé la Chine à prendre des mesures drastiques pour endiguer cet "Air-pocalypse" trop encombrant dans les médias.

    L'air de Pékin n'a, en effet, cessé de se dégrader au cours de la dernière décennie. Les statistiques officielles ayant longtemps sous-estimées le désastre, ce sont les statistiques émises par l'ambassade américaine à Pékin, qui ont pris le relais. Ces chiffres, observés quotidiennement par les pékinois font froid dans le dos, notamment les données sur les PM2,5, ces particules fines dont le diamètre est égal ou inférieur à 2,5 micromètres,  et qui sont considérées comme les plus dangereuses. Si ces particules représentent en moyenne 40 microgrammes/m3 d'air à Paris, elles sont en moyenne 5x plus élevées à Pékin! Ceci est bien sûr fortement lié à l'industrie, ainsi qu'à l'utilisation encore massive du charbon, mais surtout aux 5,35 millions de véhicules en circulation dans la ville.

    Mais pour Pékin, cela a trop duré, et la vitrine politique de la Chine ne peut se permettre plus longtemps de trôner au top des classements des villes les plus polluées du monde. C'est donc l'heure du grand nettoyage à coup de dépenses faramineuses dont la Chine a pris l'habitude.

    Le plan de sauvetage

    Le gouvernement a donc dévoilé fin Septembre un plan ambitieux de lutte contre cette pollution atmosphérique à Pékin pour une addition estimée à 160 Milliards de Dollars sur 5 ans.

    Ce chiffre semble d'autant plus impressionant, que peu de détails ont été dévoilés sur les orientations précises de ces dépenses.

    Des "mesures" plutôt, ont été dévoilées sur le durcissement des réglementations : circulation automobile alternée, limitation des immatriculations, fermeture d'industries trop polluantes, ou un encadrement plus strict des projets de construction ... En somme, peu de nouveautés sur les annonces passées.

    Le défi de la pollution dans la capitale est un enjeu primordial pour le gouvernement actuel qui doit montrer sa volonté forte d'agir en la matière, il en va de sa crédibilité et de l'image de la Chine aux yeux du monde pour la décennie à venir.


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  • Bo Xilai : Procès du prince déchu de chongqing Depuis Jeudi s'est ouvert en Chine le procès le plus important de ces 30 dernières décennies : Le procès qui décidera du destin de l'Homme politique le plus controversé de Chine : Bo Xilai.

    Bo fut en effet un redoutable homme politique en Chine dont les faits d'armes dans la ville de Dalian (Province du Liaoning) et Chongqing (Municipalité autonome du Sud-Ouest de la Chine), ont eu un retentissement très fort auprès de l'opinion publique.

    Cependant, cet homme ambitieux a finit par dépasser les limites que le pouvoir central de Pékin peut tolérer : de vedette médiatique du développement économique à Dalian, de justicier de la lutte anti-mafia à Chongqing, Bo Xilai est ainsi devenu un paria, un prince rouge déchu.

    Le fait déclencheur de cette déscente aux enfers remonte au 6 Février 2012, au moment où Wang Lijun, chef de la police de Chongqing, s'est enfui vers Chengdu (Capitale de la province du Sichuan) dans l'espoir de trouver refuge au consulat américain de cette ville. Il expliqua en effet qu'il craignait pour sa vie et se sentait menacé par Bo Xilai. Cette défection du chef de la police a révélé peu à peu les dessous de la star de Chongqing et les affaires de sa famille. Ainsi de héros national, Bo Xilai ets devenu un criminel corrompu au lourd passif.

    Mais le procès qui s'est ouvert ce Jeudi ne revient que sur une partie "infime" des accusations qui pèsent contre Bo Xilai, dont la femme a déjà été jugée pour meutre plus tôt cette année. En effet, beaucoup de crimes et délits de Bo pourraient rejaillir sur des membres du Parti et décridibiliser le gouvernement de Xi Jinping en place, ce qui n'est souhaitable pour personne.

    Vous trouverez ainsi ci-dessous, une vidéo courte des premiers jours de son procès qui porte notamment sur des pots-de-vin de son époque passée à Dalian. Le verdict est attendu ce Lundi :

    Bo Xilai : Procès du prince déchu de chongqing

    De plus, faire une description complète et détaillée de l'affaire Bo Xilai serait un peu complexe à mon avis. C'est pourquoi, je me permets d'ajouter à cet article une vidéo fort intéressante du Wall Street Journal (En Anglais), qui revient sur les détails des différents dossiers de l'affaire Bo Xilai et de sa famille :

    Bo Xilai : Procès du prince déchu de chongqing

    Bon visionnage.


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  • Comme je l'évoquais dans mon précédent article sur la croissance chinoise, la session parlementaire de l'Assemblée Nationale Populaire (ANP) s'est ouverte ce dimanche à Pékin. Elle débouchera, dans deux semaines, par la désignation officielle des nouveaux dirigeants du pays : Xi Jinping et Li Keqiang qui succèderont respectivement à Hu Jintao et Wen Jiabao.

    Cette cérémonie débute avec la Conférence Consultative Politique du Peuple Chinois (CCPPC) où de nombreux intellectuels, économistes, célébrités de tous bords ou encore représentants des peuples minoritaires sont invités à venir s'exprimer.

    Les environs du Palais du Peuple ressemblent ainsi davantage au tapis rouge de Cannes qu'au centre du pouvoir chinois ces derniers temps.

    Voir le panorama de photos du Monde en suivant le lien ci-dessous :

    http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/portfolio/2013/03/04/au-parlement-chinois-stars-paillettes-et-minorites_1842311_3216.html


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  • Les cyberattaques chinoises revues en dessin animé

    Un groupe de sécurité informatique privé américain, Mandiant, a rendu public dernièrement les fruits d'une enquête de six ans sur les cas de cyberattaques perpétrées contre des gouvernements, des firmes multinationales mais aussi des journaux (NewYork Times...) à travers le monde.

    Ils ont ainsi réussi à localiser l'origine de nombre de ces attaques dans un immeuble du quartier de Pudong à Shanghai. Cet immeuble discret serait donc la base secrète de l'unité 61 398, la cyber-cellule secrète de l'Armée Populaire de Libération.

    Un groupe d'internautes Taïwanais nous propose de revenir sur ces faits d'actualité non sans une certaine dose d'humour. Voir la vidéo ci-dessous : 

    http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=FhsU85fDmTc

    Bon visionnage


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  • La Chine réaffirme son soutien à l'Afrique 

    La Chine n'a cessé de gagner du terrain en Afrique depuis une décennie. La rencontre de Xi Jinping avec NKosazanaDlamini-Zuma, présidente de l'Union Africaine, ce dimanche à Pékin vient réaffirmer le soutien de la Chine au développement du continent africain et confirmer, par la même occasion, les liens étroits qui unissent déjà les africains à l'empire du Milieu.

    Ces liens sont avant tout commerciaux et chacun y trouve son compte. Les échanges économiques entre le continent africain et la Chine représentaient ainsi 115 Milliards de Dollars en 2010, en croissance annuelle de plus de 40% selon le Daily Telegraph.

    Et les chinois ne sont pas des partenaires économiques comme les autres, ils investissent certes de l'argent mais occupent également le terrain. En 2010, environ 750 000 chinois étaient répertoriés en Afrique dans tous les pays, ce qui en fait la première communauté non-africaine. Les chinois sur place sont également différents des autres "expatriés", ils travaillent dans les mêmes conditions que les africains dans les BTP, le pétrole, les télécoms, l'exploitation minière et forestière... Ils sont donc présents à tous les échelons et ne bénéficient pas forcément d'un traitement de faveur : ce qui nuit davantage à l'image qu'ont les africains des occidentaux sur place.

    De plus, les chinois souhaitent faire évoluer leurs relations avec le continent en se plaçant comme "grand frère". Il ne s'agit plus de considérer l'Afrique comme un simple vivier de matières premières, même si la grande majorité des échanges portent sur le pétrole, mais bien de coopérer et d'imposer son modèle de développement sur le continent. Cette stratégie mise en place depuis une bonne décennie a été formalisée par l'expression Chinafrique qui désigne les relations économiques, politiques et diplomatiques plus étroites qui se sont tissées entre le continent et l'empire du Milieu. Ces relations privilégiées ont permis à la Chine de s'imposer sur le continent face aux européens, américains mais également d'évincer Taïwan dont la présence était encore forte au début des années 2000.

    La rencontre d'aujourd'hui est donc un réengagement du prochain gouvernement chinois envers l'Afrique, mais surtout un message clair de Pékin d'accentuer sa mainmise sur le continent pour la prochaine décennie.

    Si ce sujet vous intéresse, je vous invite à lire :

    La Chinafrique : Pékin à la conquête du continent noir, de Serge MICHEL et Michel BEURET (Ed. GRASSET)


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